Qu’a-t-elle donc pour ainsi m’écorcher de ses dents cette folle, nous n’en sommes pourtant qu’à mes débuts, pour ainsi dire le col. Si seulement elle pouvait un peu calmer son hystérie, faire preuve de patience, et me découvrir en cette partie, sensible et annonciatrice, plutôt que de m’attaquer en transe, comme si je rêvais d’une dominatrice. Et puis il y’a celle qui dans la douceur fait excès, à tel point qu’au plaisir elle ne donne aucun accès. Puis celle qui me noie dans sa bave prenant cela pour un geste suave, me ramène à l’état d’escargot noyé dans le mucus et un excès d’eau, comme une toile d’araignée gluante qui me piège et lentement me ramolli et me désagrège. J’ai connu celle qui de l’intonation est sourde, mais aussi la pataude rustre et gourde. Et sa consœur qui ne cherche aucune profondeur, qui ne s’attarde sans glamour que sur les pourtours. Sans parler de la faible du gorgeon qui atrophie toutes les phonations.
Mais attention ! En ces temps où l’on ne distingue plus les sexes les hommes aussi me vexent. Si contre les dames je peste les messieurs ne sont pas en reste. Entre le buvard sorti du bar et le bavard à l’accent de boulevard qui me tordent comme une tranche de lard, les précieux poudrés de fards qui me malmènent en pensant faire de l’art, les pedzouilles venus du champ qui me mâchouillent dehors comme dedans, et le rustaud qui à sa joue m’applique et me mâche sans relâche, je rêve qu’enfin ivres, l’un comme l’autre ferment mon livre. Qu’ils me retirent de leur bouche et de leur tête, et cessent de vouloir me faire la fête, car ils n’apportent que rature à la littérature, se voyant de la rime érecteurs alors qu’ils ne sont que piètres lecteurs. Qu’ils quittent leur piédestal et descendent de leur cheval ; ne pas se tromper de personnage, de la langue je fus le héros en tout âge. Depuis les temps où les genres se faisaient guerre, de tous les genres littéraires, celui que toutes et tous préfèrent, c’est moi le poème libre et fier.
MISE EN BOUCHE
Rimaille et Coton – Collection TexStyles